Page:Sand - Mademoiselle La Quintinie.djvu/302

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de ce qu’il recélait. M. Lemontier mit l’objet dans sa poche sans l’ouvrir.

« Puisque tout nous favorise, dit-il à Henri, je veux agir vite auprès de l’abbé.

— Vous ne le trouverez pas à Aix, répondit Henri, j’y ai été ce matin. J’ai su que Moreali et le capucin allaient passer la journée à Hautecombe.

— J’irai, reprit M. Lemontier. Va-t’en à Chambéry, dis à Lucie que tout va bien, et qu’elle revienne demain sans crainte. Tu reviendras, toi, m’attendre ici, où nous passerons la nuit sans nouveau trouble. »

M. Lemontier prit une barque et gagna l’abbaye de Hautecombe, où le père Onorio, irrité du bruit et des frivoles occupations des baigneurs d’Aix, avait été s’installer pour quelques jours.

Il était trois heures quand M. Lemontier rejoignit l’abbé, qui, avant de se remettre en route pour Aix, priait, prosterné dans une chapelle. Il lui mit la main sur l’épaule, en lui disant avec autorité :

« J’ai à vous parler, monsieur ! »

Moreali ne tressaillit pas, et, après avoir baisé la poussière avec affectation, comme pour montrer qu’il s’humiliait devant Dieu, il se leva et regarda son adversaire d’un air de dédain souriant. Ils sortirent ensemble et s’enfoncèrent dans la montagne, M. Lemontier marchant le premier, jusqu’à ce qu’il se trouvât assez à l’écart des chemins frayés et des distractions qui s’y promènent.

« Monsieur, dit-il à l’abbé, j’ai été plus heureux que vous : j’ai trouvé ce que vous avez en vain cherché hier et avant-hier dans le boudoir de mademoiselle La Quintinie. »

Moreali resta immobile, comme recueilli, assez maître de lui pour ne trahir ni colère, ni terreur, ni surprise. Il pensa que Misie l’avait trahi ; il ne voulut pas dire un