Page:Sand - Mademoiselle La Quintinie.djvu/332

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âmes qui ne doivent pas être trop dirigées. Et puis elle était si jeune ! Pour le cloître comme pour le mariage, je n’ai jamais admis qu’on dût être mineur.

Je lui fis promettre de m’écrire régulièrement tous les trois mois, et j’acceptai un emploi en Italie, pays que mon origine et ma langue maternelle m’avaient toujours fait regarder comme ma patrie.

Ce qui s’est passé là ne rentre pas dans le récit que je vous dois, mais je le résumerai en peu de mots pour vous expliquer mon retour et ma conduite en présence du mariage auquel Lucie a donné malgré moi son assentiment.

J’avais été heureux, j’étais devenu optimiste. À mon insu, et comme l’onde qui creuse le rocher en tombant goutte à goutte, la tiédeur m’avait entamé, non la tiédeur quant aux vertus nécessaires à l’homme et à l’amour divin, mais un relâchement quant aux doctrines. Cet ennemi de la vraie foi que vos philosophes ont invoqué sous le nom de tolérance, les catholiques de ce temps-ci ont eu la faiblesse de s’en piquer à leur tour pour se soustraire aux reproches et pour se défendre de l’accusation de fanatisme. Ceci est l’œuvre du respect humain, autrement dit de la mauvaise honte. C’est un pervertissement de la croyance et une défection du dévouement. L’esprit pratique de la société de Jésus a cru devoir tourner au profit de sa propagande cette tendance à la mansuétude. L’intention était belle et bonne, j’en avais été séduit. J’arrivai à Rome, l’âme pleine de douceur, l’esprit nourri de transactions subtiles et tendres qui me semblaient des moyens généreux et sûrs pour étouffer dans le triomphe de la charité chrétienne universelle les dissidences et les protestations.

Je fus repris, je n’étais pas dans la voie tracée par les nécessités du temps. L’Église, menacée, était forcée de se