Page:Sand - Mademoiselle Merquem.djvu/130

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— Je ne dis pas cela ; mais Montroger, irrité des propos de madame de Malbois, que nous connaissions avant que votre tante me les eût rapportés, croyait indispensable à mon honneur que l’enfant fût éloigné du pays. Il voulait l’envoyer à l’autre bout de la France et le faire oublier. Je ne l’entendais pas ainsi. Si l’on rougit d’avoir fait son devoir parce qu’il est mal interprété, il n’y a plus de raisons pour ne pas s’en dispenser une fois pour toutes, et, si l’on vient à se cacher des choses honnêtes et justes par crainte de l’opinion, je ne vois pas pourquoi on ne se jetterait pas dans le vice et dans l’hypocrisie. Ce qui m’a plu dans votre idée, c’est que l’enfant vivra chez votre tante, et que je ne le perdrai pas de vue.

— Vous avez songé à vous et à lui, c’est fort bien ; mais ne voulez-vous pas me laisser croire qu’il y a eu aussi un peu de sollicitude pour moi dans votre préférence ?

— Comment cela ? Dites.

— J’avais besoin de m’associer à vos bonnes œuvres ; ce désir si vif ne méritait-il pas un encouragement et une récompense ?

— Vous avez l’air de me dire que vos bonnes pensées vous viennent de moi ! Je n’en crois rien. Vous valez mieux que moi, j’en suis sûre.

— Oh ! alors, vous m’estimez énormément ?

— Ce ne serait pas une raison, mais le fait n’en est pas moins certain. Je vous estime infiniment, puisque je vous confie une âme dont, à l’heure qu’il est, je puis encore disposer et que j’estime très-précieuse, — car il est charmant, ce Moïse ! Il faudra le voir, pourtant. Voulez-vous que je lui donne demain une commission pour vous ?