Page:Sand - Mademoiselle Merquem.djvu/300

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Comme j’ai été battue par la tempête ! et ce lit n’a pas sombré !

Elle ne reconnut pas Bellac, et, le prenant pour Guillaume, elle s’attacha à son bras en lui disant :

— Emporte-moi donc et mets-moi sur le sable, que je me repose.

Puis, se retournant de mon côté, elle me regarda avec un sourire enfantin et timide :

— Mon filleul !… dit-elle. Oh ! je vous voyais ramer mieux que les autres pour me sauver.

Le médecin, croyant qu’elle me prenait pour un de ses paysans, en fit entrer quelques-uns qui se tenaient sous les fenêtres, en leur prescrivant de ne rien lui dire ; elle les reconnut et dit à la mère Guillaume en me prenant la main :

— Tu sais, mère, c’est mon mari !

On crut qu’elle divaguait encore.

Bellac fit sortir tout le monde excepté ma tante et moi, dont Célie ne voulait pas quitter la main. Elle resta une heure immobile, les yeux fermés, pâle comme l’aube et divinement belle avec ses cheveux crêpelés, qui tombaient sur ses épaules. Après ce repos complet, elle reconnut d’abord le portrait de l’amiral placé en face de son lit, puis sa chambre, et elle nous demanda pourquoi elle était couchée, au lieu de nous recevoir au salon. Quand elle se rendit compte de ce qui s’était passé, elle prit nos mains à tous trois, et les baisa en nous demandant pardon de notre inquiétude et de nos fatigues. Elle ne se souvenait pas d’avoir souffert et nous jurait qu’elle était guérie. Elle ne parut pas se souvenir non plus de Montroger.

Quelques heures plus tard, elle eut un peu d’agitation, et, me rappelant près d’elle, elle me dit tout bas :