Page:Sand - Mademoiselle Merquem.djvu/96

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rieux. Je me contentai de les habituer à ma figure, et je feignis de m’intéresser à leurs travaux et à leurs occupations.

Comme j’allais me retirer, car je voyais Stéphen impatient de reprendre ses pinceaux, un vieux pêcheur me dit qu’il connaissait bien ma figure. Il m’avait vu passer en voiture avec M. de Montroger, me rendant au château de la demoiselle.

— C’est possible, lui dis-je. Est-ce que M. de Montroger vient quelquefois chasser par ici ?

— Pas souvent, répondit-il. C’est un homme qui a de grandes affaires dans le pays. Il est venu une fois, il y a deux mois, pour voir le petit.

— Je ne connais pas le petit, repris-je de l’air le plus indifférent, bien que je sentisse la rougeur me monter au visage.

— Il ne vous a pas parlé du petit ? Alors, vous ne savez pas l’histoire !

— Je ne suis pas du tout curieux.

— On peut être curieux des jolies histoires, et, si vous voulez voir le gars… Oh ! mais c’est un joli gars, et raisonnable, et comme il faut tout à fait.

— Vous me direz cela une autre fois, repris-je en me levant de la vieille barque échouée sur laquelle je m’étais assis, et je m’éloignai avec Stéphen, d’un air moqueur et froid, comme si j’eusse été décidé à ne rien entendre.

L’effort fut héroïque, car je croyais tenir le terrible secret de Célie ; mais, puisque ces bonnes gens étaient si faciles à confesser, je voulais l’apprendre comme malgré moi et pouvoir jurer un jour à mademoiselle Merquem que je ne l’avais