Page:Sand - Mauprat.djvu/124

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avec son costume de braconnier ; cela allait mieux à sa figure et à sa taille.

— Il avait l’air d’un bandit ; Mademoiselle ne l’a donc pas regardé ?

— Si fait.

Le ton dont elle prononça ce si fait me fit frémir, et je ne sais pourquoi l’impression du baiser qu’elle m’avait donné à la Roche-Mauprat me revint sur les lèvres.

— Encore, s’il était coiffé ! reprit la duègne ; mais jamais on n’a pu le faire consentir à se laisser poudrer. Saint-Jean m’a dit qu’au moment où il avait approché la houppe de sa tête il s’était levé furieux en disant : « Ah ! tout ce que vous voudrez, excepté cette farine-là. Je veux pouvoir remuer la tête sans tousser et éternuer. » Dieu ! quel sauvage !

— Mais, au fond, il a bien raison : si la mode n’autorisait pas cette absurdité-là, tout le monde s’apercevrait que c’est laid et incommode. Regarde s’il n’est pas plus beau d’avoir de grands cheveux noirs.

— Ces grands cheveux-là ? Quelle crinière ! cela fait peur.

— D’ailleurs, les enfants ne portent pas de poudre, et c’est encore un enfant que ce garçon-là.

— Un enfant, Tudieu ! quel marmot ! il en mangerait à son déjeuner, des enfants ! c’est un ogre. Mais d’où sort ce gaillard-là ? M. le chevalier l’aura tiré de la charrue pour l’amener ici. Est-ce qu’il s’appelle ?… Comment donc s’appelle-t-il ?

— Curieuse, je t’ai dit qu’il s’appelle Bernard.

— Bernard ! et rien avec ?

— Rien, pour le moment. Que regardes-tu ?

— Il dort comme un loir ! Voyez ce balourd ! Je regarde s’il ressemble à M. le chevalier. C’est peut-être un instant