Page:Sand - Monsieur Sylvestre.djvu/126

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robe noire très-simple, mais d’une ampleur trois fois aristocratique. Elle s’était levée comme pour me questionner sur l’état du malade ; mais tout à coup, comme si elle eût reconnu en moi une figure qu’elle ne souhaitait pas rencontrer, elle me tourna le dos. Je ne crus pas devoir me montrer curieux, je sortis. Farfadet, que je voulus emmener, ne consentit pas à me suivre. Il resta sur l’escalier, inquiet et mécontent, grommelant tout bas. Je fis quelques pas dehors. Le jour éclairait encore un peu. Je vis au bas du sentier une voiture brillante, un gros cocher, deux chevaux fringants et une ombre noire, debout à quelque distance. Je ne crus pas devoir m’éloigner de l’ermitage. J’étais un peu méfiant, un peu soucieux, comme Farfadet. Au bout de dix minutes, je le vis venir à moi comme pour m’appeler, et je rentrai, résolu à être impoli plutôt que de laisser tourmenter mon malade, lequel ne m’avait pas semblé accueillir cette visite avec beaucoup de joie. Je me croisai avec les deux femmes, qui sortaient suivies de leur laquais. Il me sembla que la plus grande, qui avait la démarche élégante et jeune, étouffait des larmes, et j’entendis la voix de l’autre — une voix qui ne m’est pas inconnue — lui dire :

Alors, c’est toujours la même chose ? il ne veut pas ?

Elles passèrent, et je trouvai M. Sylvestre absorbé. Quand il me vit, il me demanda si la femme qui était entrée chez lui était venue seule. Je ne pus prévoir que je dusse le tromper, je lui dis qu’une autre femme avait attendu en bas.

— Quoi ! s’écria-t-il, elle a osé entrer ici ! Ah ! je voyais bien qu’on me mentait ! Mon ami, si je retombais malade, jurez-moi que personne d’étranger, per-