Page:Sand - Monsieur Sylvestre.djvu/194

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Cette page n’a pas encore été corrigée

— Ce serait à vous de l’aimer et à moi de l’adorer, car je le connais beaucoup, et vous le connaissez à peine.

— C’est vrai, mais il a pour moi un prestige… Je ne peux pas expliquer ça ! c’est mon rêve de tous les instants. N’est-ce pas qu’il a du génie ?

— Le plus beau génie, celui qui vient du cœur.

— Il a bien aussi ses obscurités, on ne le comprend pas toujours.

— Parlez pour vous, mademoiselle Jeanne ; moi, je le comprends toujours.

— Ah ! dame ! c’est tout simple, vous êtes un homme instruit, à ce qu’on dit : moi, je ne suis qu’une enfant.

— Eh bien, c’est très-beau d’être une enfant ! Il faut l’être tout à fait et avoir confiance.

— C’est-à-dire qu’il faut étudier Mozart avec foi ?

— Oui, mademoiselle.

— Comme vous dites cela sévèrement !

— Je le dis sérieusement, voilà tout.

Après le dîner, comme j’errais seul sous les grands arbres du jardin, je vis arriver mademoiselle Jeanne, qui paraissait entraîner mademoiselle Vallier malgré elle.

— Eh bien, mademoiselle Jeanne, lui dis-je en riant, vous voulez encore parler de Mozart ?

— Oui, répondit-elle ; mais je voulais d’abord vous parler de vous, et je n’ose pas.

— Osez, mademoiselle, je suis votre arrière-grand-père ; car l’ermite me fait l’honneur, pour se moquer de moi, il est vrai, mais avec affection quand même, de m’appeler son papa.

— Oh ! je sais cela, reprit-elle, je sais tout !… et