Page:Sand - Monsieur Sylvestre.djvu/227

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vrai. Le banquier qui a fait faillite n’avait à elle que des sommes insignifiantes.

— Pourquoi fait-elle courir ce bruit ?

— Pour lever les scrupules de l’homme qui épousera sa fille.

— C’est donc un piège tendu d’avance à l’amoureux naïf qui s’y laissera prendre ?

— Peut-être ! Mais Jeanne fera échouer cette combinaison.

— Comment cela ?

— Elle refusera toute espèce de dot.

— Je ne comprends pas.

— Jeanne sait tout ; une femme de chambre l’a éclairée sur sa situation ; elle quitte sa mère. Oh ! c’est une fille énergique avec son air enfant ! Il paraît qu’elle a écrasé la pauvre Irène. Rébecca a assisté à une vraie scène de mélodrame.

— Eh bien, mademoiselle Jeanne a eu tort !

— Vous trouvez ?

— Oui. Dans les mélodrames, la fille intéressante adore sa mère quand même. C’est classique, et ce n’est pas vraisemblable, mais c’est généreux. J’aurais autant aimé mademoiselle Jeanne moins réaliste.

— Ah ! que voulez-vous ! cette petite aime peut-être quelqu’un ! Ce n’est pas sa faute si le passé de sa mère est un obstacle ! Naturellement, l’innocence se révolte contre le vice qui lui fait porter la peine de sa honte.

— L’innocence ne devrait pas si bien comprendre ce que c’est que la honte et le vice.

— L’innocence devine ce qu’elle ne comprend pas. D’ailleurs. Irène s’est chargée d’éclairer sa fille, car elle a perdu la tête, et, dans son chagrin, dans sa colère, elle a déclamé sur tous les tons, tantôt s’oubliant