Page:Sand - Mont-Reveche.djvu/366

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trop tard, sinon pour elle, du moins pour les autres.

Olympe ressuscita dans les bras de son mari agenouillé devant elle. Blondeau, jugeant que la joie était le meilleur remède aux maux produits par le chagrin, alla voir Éveline pour leur laisser la liberté de s’expliquer. Olympe recouvra la parole et la mémoire. Elle n’avait pas compris les derniers reproches de son mari. Elle ne savait pas qu’il eût pu être jaloux de Flavien ; son intelligence avait été comme paralysée à partir du moment où il l’avait grondée (c’était son expression) d’avoir gardé le secret d’Éveline. Dutertre remercia Dieu dans son âme de n’avoir pas été compris. Il rougissait d’avoir pu accuser un être si pur et si doux ; il ne s’en consolait que par la pensée qu’elle n’avait pas senti la pire blessure, celle de l’outrage infligé par ses soupçons.

— Oh ! qu’elle ne sache jamais, mon Dieu ! disait-il en priant dans son âme comme un enfant, qu’elle ne sache jamais que j’ai été jaloux ! Ce serait la fin de son amour et la fin de ma vie.

— Pourquoi donc me grondais-tu si fort ? disait Olympe avec la naïveté de l’innocence. Est-ce parce que ma visite à Mont-Revêche pouvait être connue, mal interprétée, et faire mal parler de moi ? Mon Dieu ! il s’agissait d’empêcher que ces malheurs-là n’arrivassent à ta fille. Je t’avoue que je n’ai pas pensé à moi, et, si j’y avais pensé, il me semble que j’aurais encore agi comme je l’ai fait ; car c’eût été mon devoir, à moi qui suis aimée de toi, à moi qui ne peux être soupçonnée par mon mari, et qui, du sein d’un si parfait bonheur, puis braver le monde entier, de me sacrifier à cette enfant qui n’a pas encore trouvé un appui semblable, et dont l’avenir dépendait en ce moment de mon dévouement pour elle.

— Ange de candeur et de bonté ! disait Dutertre en