Page:Sand - Mont-Reveche.djvu/43

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Caroline, assise dans la poche de son père et son bras passé sous le sien, comme si elle eût craint qu’on ne le lui enlevât, parut écouter ses moindres paroles avec admiration. Madame Dutertre, parlant peu, mais bien, répondant et questionnant juste, montrant le calme et l’aisance d’une femme de la meilleure compagnie, chatouilla encore de temps en temps l’oreille musicale de Thierray par un son de voix aussi frais et aussi pur que celui d’une jeune fille. M. Dutertre causa agréablement et solidement avec les trois hommes, sans oublier de se tourner souvent vers sa femme, comme pour la consulter ou la prendre à témoin, avec ce suprême bon goût de déférence qui vient du cœur encore plus que de l’éducation.

— Voilà un homme bien fort, pensait Thierray en l’observant. Qui croirait à l’épouse coupable, d’après cette manière d’être si parfaite, si je n’avais vu le baiser sur la main ?…

Dutertre devint l’objet de son admiration, et le type qu’il se promit d’étudier. Quant à Olympe, les lueurs blafardes que le feu mourant envoyait à son visage pâle ne dessinaient qu’un ovale pur et des cheveux en apparence très-noirs, et Thierray, en retrouvant le vague ensemble de la beauté qui l’avait charmé, se demandait s’il avait rêvé ou s’il rêvait encore.

En ce moment, M. Dutertre sonna pour demander de la lumière, et Flavien, profitant de ce dérangement, prit congé pour se retirer.

Thierray le suivit, et, dans l’antichambre, ils rencontrèrent les valets qui apportaient les candélabres allumés.

— Il est bien temps ! dit Thierray en riant.