Page:Sand - Mont-Reveche.djvu/80

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vers l’angle de la cour, ouvrir une porte vermoulue, qui n’était élevée que de deux marches au-dessus du sol.

— Sais-tu, dit Thierray à Flavien en l’arrêtant sur ces marches, pendant que Manette entrait pour ouvrir les contrevents du salon, que ton manoir de Mont-Revêche, vu au soleil, est une chose ravissante ?

— Oui, dit Flavien, c’est un petit Louis XIII assez gentil, et mieux conservé que je ne pensais. Hier, à la pluie, tout cela était sombre et humide ; cela sentait le rhume de cerveau, espèce d’incommodité ridicule, hideuse, et que je crains plus que l’apoplexie. Mais, ce matin, je me réconcilie avec cette petite construction. Elle est assez originale. Je voudrais pouvoir la transporter en Touraine ; cela ferait bien dans un coin de mon parc.

— Ah ! créjusse que tu es ! s’écria Thierray ; avec quel dédain tu parles de ce bijou, toi qui as des châteaux renaissance en Touraine, et peut-être des châteaux gothiques dans tous les coins du territoire ! Tu trouves cela gentil, cette petite cour où viennent se resserrer ces façades irrégulières, mais toutes élégantes et curieuses, aux plans sveltes et nus, couronnés d’ornements plus sobres que ceux de la renaissance, moins froids que ceux du grand siècle ; ces fenêtres qui ne sont ni le carré du xvie siècle, ni le carré trop long de la fin du xviie. Sais-tu que le pur Louis XIII est ce qu’il y a de plus rare en France depuis le grand abatis de châteaux que suscita la minorité de Louis XIV ? Regarde le tien : c’est un bon vieux petit frondeur qui se donne encore à la sourdine des airs de féodalité dans ses étroites proportions ; un domicile non fortifié, et cependant agencé, sinon pour les bravades de la défensive, du moins pour les mystères des conspirations ; tout en dedans, portes, fenêtres, escaliers, cuisines, écuries, chapelle, salon, ayant rendez-vous sur