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Page:Sand - Nanon, 1872.djvu/104

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à l’État par M. le prieur. Mais tout cela ne vous regarde pas et ne vous intéresse en aucune façon, puisque vous vous obstinez à ne pas me reconnaître pour ce que je suis ; je viens simplement vous demander où est ma sœur, et j’espère que vous n’avez pas de raison pour me le cacher.

— Je n’en ai pas ; votre sœur, puisque vous prétendez être un Franqueville, est à Tulle dans ma famille. Il y avait danger pour elle à rester ici, les paysans étant très animés contre vous autres ; c’est par miracle que j’ai pu les contenir et je ne dors pas chez vous sur les deux oreilles, croyez-le bien. J’ai envoyé la petite au loin ; elle est bien soignée et je paye ce qu’il faut pour son entretien.

Émilien demanda le nom de_ _la parente à qui l’intendant disait avoir confié l’enfant, et, sur-le-champ, il repartit sans se faire reconnaître d’aucun domestique et sans songer qu’il donnait raison par là aux soupçons de l’intendant ; mais, quand il eut gagné la sortie du hameau, il se trouva en face d’un vieux domestique de sa maison qui l’avait toujours beaucoup aimé et qui le reconnut tout d’un coup en s’écriant :

— M. Émilien !

Émilien avait le cœur gros, il se jeta dans les bras de ce vieux ami en sanglotant, et tout le village d’accourir et de lui faire fête. On l’aimait, lui, on le savait victime de l’ambition de son aîné et des fausses idées de sa famille, on se souvenait de l’avoir vu_ _abandonné à lui-même, vivre en égal avec les plus pauvres. Les têtes se montèrent ; on avait aimé l’intendant tout le temps qu’il avait apaisé les colères en annonçant la vente des biens des émigrés ; mais on voyait bi