—Ne maudissons pas la République, me dit-il, pleurons-la, au contraire ! Ces férocités, ces injustices sont des attentats contre elle ; c’est elle que l’on tue en sacrifiant des innocents et en démoralisant le peuple, qui ne la comprend plus !
— À présent, lui dis-je, il faut fuir, il faut fuir cette nuit ! Vous voyez bien que votre tour viendra demain, et, quand vous serez condamné, on vous surveillera tant que je ne pourrai rien.
— Non, répondit-il : il faut attendre encore…
Et, comme nous nous disputions, j’entendis monter l’escalier et je courus me placer à la porte avec mon panier et mon balai comme si je finissais mon service ; mais je me trouvai en face de M. Costejoux et j’étouffai un cri de joie ; le geôlier le suivait. Il le renvoya sans avoir l’air de me connaître, et me dit :
— Va me chercher de quoi écrire. Je veux interroger moi-même ce prisonnier.
J’obéis bien vite, et, quand je remontai :
— Referme la porte, dit-il, et parlons bas. J’ai vu le représentant Lejeune, et, comme on allait interroger Émilien et le juger une seconde fois comme étant du ressort de Limoges, que vous dirai-je ? je l’ai réclamé au nom de Pamphile, qui veut sa proie ! J’ai pris sur moi de le lui conduire et je l’emmène. Nous partons ce soir. Il ne faut pas se dissimuler que Pamphile est plus influent que moi. Il faut donc qu’Émilien s’évade durant le voyage. Ce ne sera pas très difficile, mais où ira-t-il ? où sera- t-il en sûreté ? voilà ce que je ne sais pas.
— Je le sais, moi, répondis-je.
— Eh bien, ne me le dis pas et allez à