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Page:Sand - Nouvelles Lettres d un voyageur.djvu/101

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qu’il ne faut pas exercer la vue, dans la crainte de la fatiguer. L’œil est complet ou non, mais il ne peut que gagner à fonctionner régulièrement. Des semaines et des mois de repos, que l’on me disait et que je croyais nécessaires, augmentaient le nuage qui me gêne. Des semaines et des mois d’étude à la loupe m’ont enfin prouvé que la vue revient quand on la sollicite, tandis qu’elle s’éteint de plus en plus dans l’inertie ; mais, en ceci comme en tout, il ne faut point d’excès.

L’herbier se prête aussi aux exercices de la mémoire, qui est un sens de l’esprit. Si on ne le feuilletait de temps en temps, les noms et les différences se confondraient ou s’échapperaient pour qui n’est pas doué naturellement du beau souvenir qui s’incruste. Les soldats passés en revue, avec leurs costumes variés, se confondraient dans la vision, s’ils n’étaient bien classés par régiments et bataillons. Ils défilent dans leur ordre ; on reconnaît alors facilement chacun d’eux, et, avec son nom et son origine, on retrouve son histoire personnelle, on se retrace des lieux aimés, des personnes chéries ; on revoit les douces figures, on entend les gais