D’où vient donc que des générations entières passent au milieu du temple universel sans apprendre à construire un seul édifice qui ne soit grossier et disproportionné, tandis que d’autres générations se sont tellement préoccupées du beau extérieur, qu’elles nous ont transmis les objets les plus futiles, empreints d’une invention exquise ou d’une correction méticuleuse ? C’est que l’humanité n’a pu se développer par tous les côtés à la fois. Incomplète encore et ne suffisant pas à l’énorme gestation de son travail interne, elle a dû négliger l’art lorsqu’elle existait par la guerre, de même qu’elle a dû négliger la politique lorsqu’elle s’est laissée absorber par le luxe et le goût. On a conclu jusqu’ici, comme Jean-Jacques-Rousseau, que l’esprit humain était à jamais condamné à perdre d’un côté ce qu’il acquérait de l’autre. Mais c’est une erreur que repoussent les esprits sérieux. Ne sentent-ils pas déjà en eux la perfectibilité se manifester par les besoins du cœur et de l’intelligence, qui ne peuvent se réaliser tout d’un coup, mais dont la présence dans le cerveau humain est une souffrance, un appel, une protestation contre le fini des choses passées,