Page:Sand - Nouvelles Lettres d un voyageur.djvu/54

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

quand on a fait le plus long trajet possible. Pour vous expliquer la froide hypothèse de tout à l’heure, j’ai été obligé de recourir à des hypothèses ; mais j’ai un peu d’étude, et je peux vous dire à coup sûr que l’étude enflamme. Or, l’étude nous est donnée par ceux qui savent, et il est impossible de renier et de méconnaître les initiateurs à qui l’on doit de vives et pures jouissances.

Ces jouissances, vous ne les avez pas bien comprises, et pourtant elles n’ont rien de mystérieux. Vous me disiez : « J’aime les fleurs avec passion, j’en jouis plus que vous qui cherchez la rareté, et trouvez sans intérêt les bouquets que je cueille pour vous tout le long de la promenade. »

D’abord un aveu. Vous me saignez le cœur quand vous dévastez avec votre charmante fille une prairie émaillée pour faire une botte d’anémones de toutes nuances qui se flétrit dans nos mains au bout d’un instant. Non, cette fleur cueillie n’a plus d’intérêt pour moi, c’est un cadavre qui perd son attitude, sa grâce, son milieu. Pour vous deux, jeunes et belles, la fleur est l’ornement de la femme : posée sur vos genoux,