Page:Sand - Pierre qui roule.djvu/99

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Malgré ce nouvel obstacle bien évident pour moi, malgré le soin que j’apportai à paraître sage, je sentis bientôt se réveiller l’intensité de mon désir ; c’était comme une démence, une idée fixe. Les prétentions insensées de Léonce me donnaient la force de cacher mon mal, non celle de le vaincre. J’étais attiré par Impéria, à son insu, comme le papillon par la lumière ; je voulais absolument me brûler. Elle était plus que moi par la naissance et l’éducation, par sa position déjà presque faite et son avenir déterminé, par son talent, incomplet encore, mais que je n’atteindrais peut-être jamais, par son âge enfin, qui lui donnait plus de raison que je n’en avais, par son expérience du malheur, qui lui donnait plus de force et de mérite.

Que pouvais-je lui offrir ? Une figure que l’on vantait et qui ne lui plaisait peut-être pas, une petite somme qui représentait de quoi vivre pauvrement durant les deux ou trois années de mon apprentissage, et un amour enthousiaste qu’elle n’avait pas de motifs pour croire durable.

C’est ce qu’elle me fit parfaitement comprendre lorsqu’elle fut forcée de remarquer mes soins et de deviner l’émotion de mon silence. Je m’observai