Page:Sand - Questions d’art et de littérature, 1878.djvu/287

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duit le beau dans la nature ? Mais là nos questions restent également sans réponses. La Chimie aura beau constater en quoi c’est fait, comme disent les enfants, jamais elle ne saisira le mode des mystérieuses opérations qui désagrègent ceci ou cela, pour le réagréger et le transformer à d’autres fins. Comment les Morpho, ces lépidoptères métalliques de la Nouvelle-Grenade, qui volent sur les mines de cuivre, prennent-ils l’éclat et les reflets chatoyants de l’azurite et des diverses combinaisons de couleur que le minerai cache au sein de la terre ? Tu as fait une étude de ces affinités frappantes ou plutôt de ces réactions du milieu de l’être qui s’y produit. Me diras-tu comment le métal semble transmuer ses oxydes aisés en tissus squalleux, en laque gommeuse, en plumes imperceptibles, pour dorer en vert, en bleu, en rouge, enjaune, en orange, en violetétincelant, la chrysalide, la chenille, et la robe de ces incomparables papillons ? Tu dis que les Indiens ne s’en cassent pas la tête et qu’ils supposent tout bonnement que c’est le vert-degris qui les colore de la sorte. Mais moi, je crois qu’ils ont raison, ces bons sauvages, et que la nature tire tous ses matériaux de travail du même alambic. Seulement, comment s’y prend-elle ? Comment, dans les froides régions où elle n’a plus le concours d’un généreux soleil pour faire pleuvoir diamants et rubis sur ses créatures, compose-t-elle, avec les purs reflets de la neige, les sombres couleurs des lichens et les satins des écorces, ces douces harmonies des espèces boréales ?

Pourquoi Pantherode pardalaria, si bien nommée, offre-t-elle l’image frappante de la robe de la panthère ?