Page:Sand - Questions d’art et de littérature, 1878.djvu/391

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évanouie du royaume des Atlantes à travers les brumes obscures de l’âge antéhistorique et les dislocations géologiques qui révèlent l’histoire de la planète.

Quoi qu’il en soit, et en attendant une découverte toujours possible, le rêve d’une civilisation disparue est toujours dans les notions de l’homme qui se reporte à la contemplation de ses origines religieuses et sociales, et il n’y a rien là qui choque la raison. Les derniers bouleversemens considérables de l’écorce terrestre ont pu engloutir une contrée vaste ou florissante, une antique Albion de l’Orient, ou une petite république comme celles de la Grèce, qui firent tant de bruit en occupant si peu de place. À cet écroulement d’un monde, centre relatif des lumières de nos ancêtres, a pu succéder une longue période de barbarie au sortir de laquelle l’homme, croyant commencer son histoire, ne fit que la recommencer, et se nourrir des mythes vaguement conservés dans ses traditions, en s’imaginant fonder des dogmes et se servir de symboles nouveaux.

De tous les sujets qui piquent la curiosité et font travailler l’imagination, la catastrophe de l’Atlantide est peut-être le plus saisissant. Les anciens avaient esquissé ce drame horrible et prodigieux. Notre déluge de Noé en est une version merveilleusement empreinte du caractère positif de la race sémitique. Le patriarche emmagasine dans son arche les dons et les fléaux de Dieu, sans autre motif qu’un esprit d’ordre qui va jusqu’à la passion de l’inventaire. Dans la légende du Coq, le mage Xizouthros exprime des idées plus hautes et des vues plus profondes :

« Comme les laboureurs et les femmes se plaignaient de ce fléau (les rats et les souris qui avaient