Page:Sand - Questions politiques et sociales.djvu/256

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écrit tracé sous l’influence des premières manifestations populaires depuis l’avènement de la République, nous avons posé un principe auquel nous avons eu foi toute notre vie et dont ces manifestations admirables ont été la réalisation frappante. Nous rappellerons ici ce principe avant d’entreprendre un travail périodique qui n’en sera que la déduction modeste et patiente :

« L’homme isolé ne compte point devant Dieu et ne saurait agir sur les hommes. »

Par l’homme isolé, j’entends celui qui se renferme systématiquement dans une retraite intellectuelle et morale, sans consulter les pulsations de la vie qui circule dans les veines du genre humain. Par l’homme isolé, j’entends celui qui s’individualise systématiquement dans l’esprit d’une caste ou d’une secte, qui se fait le chef, l’apôtre ou le disciple d’une théocratie ou d’un privilège. Certains utopistes de ces derniers temps me paraissent des intelligences frappées de mort ou de maladie par l’isolement, tout aussi bien que « les économistes de l’école aristocratique. Il faut dire bien vite que la différence morale est grande entre, eux. Les premiers ont été abusés par un dérèglement de bonnes aspirations, par l’orgueil des sentiments généreux. Les seconds ont eu le jugement perverti par l’égoïsme. — Avant le 24 février, les premiers marchaient dans la fièvre, les seconds s’arrêtaient dans la paralysie.

Il y a presque toujours de grandes et belles clartés dans l’âme troublée d’un fanatique sincère. Il y a toujours des nuages obscurs et des exhalaisons mortelles