Page:Sand - Questions politiques et sociales.djvu/257

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dans la pensée d’un sceptique endurci. Il y a du respect mêlé à la douleur qu’inspirent certaines aberrations. Il y a toujours de la répulsion dans la pitié qu’inspire une prétendue raison qui, par la froideur et l’insensibilité, aboutit à l’absurde.

Ainsi donc, deux écueils dont il faut se préserver avec des sentiments et des armes différentes, mais dont il faut se préserver sous peine de quitter le chemin de la vérité : l’erreur de la secte ou de l’orgueil individuel, l’erreur de la caste ou de l’intérêt personnel.

Ces deux écueils ont été produits par la même erreur : c’est que la vérité pouvait être une révélation isolée dans le monde. Cette erreur repose fatalement sur un principe aristocratique ou théocratique. Le sentiment républicain, c’est-à-dire le sentiment égalitaire, la combat en nous et doit la combattre dans l’humanité transformée.

La vérité n’est pas une faveur que Dieu accorde exclusivement à quelques-uns, en leur confiant la fonction de l’enseigner à tous. Cette croyance, prise d’une manière absolue, est un mensonge du passé, dont l’humanité libre s’affranchit.

I] est bien certain que Dieu confie des fonctions diverses aux intelligences. À ceux-ci, il donne la forme ; à ceux-là, le fond. L’un conçoit mieux les idées qu’il ne les explique, et réciproquement. Chacun a sa manifestation particulière : l’un parle, l’autre écrit, un troisième chante, d’autres se manifestent dans l’art, d’autres encore dans la science : tantôt c’est le discours qui, dans la bouche de l’homme éloquent, sert