Page:Sand - Questions politiques et sociales.djvu/53

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parler vrai. Ils ne disposent plus de notre cou pour nous pendre, ni de nos épaules pour y faire tomber des coups de bâton, ni de nos femmes par droit du seigneur ; mais ils disposent de nos estomachs pour les laisser jeûner, de nos bras pour les faire travailler à leur profit moyennant salaire trois fois insuffisant… Et tant qu’à nos femmes, à nos sœurs, à nos filles…, oh ! bonnes gens, vous sayez bien qu’un écu, un tablier de soie, un peu d’aise et de gloriole, quelquefois, hélas, faut-il ! le besoin d’une pauvre mère de famille, font faire de plus vilaines choses que l’ancien droit dont je sais et ne veux pas dire le vrai nom. Du moins, si celui-ci nous humiliait et nous rabaissait, il nous portait moins de peine dans le cœur. On pouvait croire que ces pauvres créatures du bon Dieu avaient agi par crainte, par superstition, car on s’imaginait que le seigneur était plus qu’un homme. Quand on ne le respectait pas comme un ange, on en avait peur comme d’un diable. À présent, le diable s’est fait bonhomme : il se promène en redingote et en casquette autour de nos maisons, on s’en défie moins. Mais, quand on y songe, on doit s’en méfier davantage ; car, si l’on défend ses brebis, qui vous dit que ce riche qui ne craint ni Dieu ni diable, qui se moque du scandale comme du curé, et de la loi qui est faite et appliquée par lui et pour lui, ne vous ruinera pas" bientôt en vous chassant de la maison qu’il vous a louée, en réclamant l’argent qu’il vous a prêté (je ne veux pas dire à quel taux d’intérêt !) ; enfin, en vous refusant l’ouvrage dont vous ne pouvez pas vous passer ? Fermez les yeux, tout ira