Page:Sand - Simon - La Marquise - M Rousset - Mouny-Robin 1877.djvu/280

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Il chargea le côté gauche qu’on lui indiqua, et mon frère chargea l’autre.

— Avec celui-ci, dit Mouny en montrant celui qu’il venait de charger, vous ne manquerez pas.

— Et avec l’autre ? dit mon frère.

— Avec l’autre, vous ne toucherez pas, répondit-il.

Un vanneau passa, mon frère l’abattit ; puis une grive, et il la manqua. Le coup chargé par Mouny avait porté, l’autre avait été casser une branche dix pieds trop haut.

— Et maintenant chargez le côté droit, dit mon frère. Il est possible que par là le fusil soit meilleur.

— À votre aise, dit Mouny-Robin. Il chargea le droit, et mon frère le gauche. Avec le gauche il toucha, avec le droit il ne toucha point. L’épreuve fut répétée toujours en sens contraire, cinq ou six fois de suite, et le résultat, fut toujours celui que Mouny avait annoncé. À la septième : — Cette fois, dit-il, vous allez tuer avec votre charge et manquer avec la mienne ; je suis fatigué.

Le fait suivit et confirma la prédiction.

De pareilles expériences ne pouvaient pas être attribuées obstinément au hasard et à l’adresse. Mouny était parfois lui-même d’une maladresse incroyable, et il n’en paraissait ni surpris ni humilié. Je sentais cela, disait-il. Il n’y mettait pas d’autre amour-propre. Il était beau chasseur comme on est beau joueur. Nous lui accordions d’être plus exercé et plus habile que nous ; cela ne suffisait pas pour expliquer les faits de divination véritable dont nous étions témoins tous les jours. Il me serait difficile de traduire nettement l’impression que ces faits produisirent sur nous à la longue. Il n’y a pas de fait si remarquable auquel on ne s’accoutume, et pourtant rien au monde n’est aussi difficile à vérifier et à constater qu’un fait de ce genre. Les continuelles et consciencieuses recherches de certains partisans du magnétisme, qui ne