Page:Sand - Souvenirs de 1848.djvu/27

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est conforme à l’esprit de liberté, et c’est un grand progrès dans leurs mœurs, c’est une grande preuve que nous sommes mûrs pour la République.

Mais que la secte veuille profiter d’un épouvantable malentendu pour s’emparer du pouvoir par surprise, voilà une résolution qui, sous la tyrannie, peut être un acte d’héroïsme, et qui, sous la république, à l’aurore d’une république encore ébranlée par les irrésolutions, devient un acte de personnalité coupable.

Ceci n’a point encore eu lieu depuis l’avènement de notre jeune République. Nous ne pouvons croire aux accusations portées par la voix d’une panique trompeuse contre quelques hommes. Mais quelques hommes, il faut bien le dire, ont donné lieu à cette panique par une attitude et un langage que l’esprit de secte peut seul inspirer. Voilà pourquoi nous déplorons que l’esprit de secte ait survécu parmi nous au régime d’oppression qui pouvait le faire excuser. Voilà pourquoi nous disons au peuple : Si nous voulons pratiquer en commun quelques idées nouvelles, soyons avant tout dans la charité et dans la fraternité. Ne nous imposons point de papes, car tous les papes veulent être infaillibles, tous les papes disent : « Hors de mon église point de salut. » Et, quand un groupe d’hommes aura proclamé ce principe, il deviendra naturellement l’ennemi de tous les autres groupes, jaloux à leur tour d’avoir la vérité absolue.

Qu’on veuille bien faire attention à la distinction que nous tâchons d’établir. Nous ne repoussons pas les essais de doctrine particulière, quand ces doctrines