Page:Sand - Souvenirs et Idées.djvu/126

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embarrassé, on le voit, débaptiser ses victimes. Tantôt ce sont les rouges, tantôt les insurgés, mot lugubrement emprunté aux journées de Cavaignac. Tantôt les émeutiers, et, en somme, les ennemis de la famille et de la propriété. Aussi, pour les réprimer, le parti de la famille et de la propriété, représenté par nos braves troupes, a violé les femmes et pillé les maisons. On n’ose pas avouer que ce sont des bourgeois mécontents, les uns démocrates, les autres républicains modérés, d’autres orléanistes et légitimistes, la plupart constitutionnels tout simplement, qui ont fait preuve de courage et de désespoir. On ne l’avouera pas. Le fait n’en restera pas moins certain pour moi. La véritable fibre populaire n’a pas tressailli ce jour-là, si ce n’est d’horreur et de pitié ! car il faudrait haïr le peuple s’il s’était réjoui de voir donner une frottée aux bourgeois. Mais le peuple pouvait-il, devait-il courir à leur aide, avec la certitude qu’aussitôt ils se tourneraient contre lui et se réuniraient, pour la plupart, aux soldats pour l’écraser ? Ne l’ont-ils pas dit sur tous les tons et avec la plus lugubre crudité de langage depuis trois ans ? Tout plutôt