Page:Sand - Theatre complet 1.djvu/414

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être un grand homme. Mais que cet homme périsse, ou seulement qu’il change un peu ! que l’âge, l’humaine faiblesse, et surtout l’enivrement de sa puissance, lui donnent les vices que vous blâmez en nous ! et vous verrez s’il ne viendra pas prendre votre femme jusque dans vos bras ! Et puis vous chercherez à qui demander vengeance alors que vous n’aurez plus ni parlement, ni féodalité, ni franchises d’aucune sorte, rien enfin qui fasse équilibre à cette autorité sans règle et sans frein !

MOLIÈRE

L’équilibre se fera autre part, peut-être !

CONDÉ

Voulez-vous dire qu’il se fera par les gens du peuple ? Je vous répondrai que, si tous les monarques ne sont pas Louis XIV, tous les plébéiens ne sont pas Molière, et que nous ne prétendons pas soutenir une seconde fois le contre-poids de la démagogie. Non, morbleu ! non, Bordeaux ne relèvera pas le drapeau sur ses clochers, et nous avons à jamais brisé, sur les sceaux de la rébellion, la surprenante effigie de la République ! Vous allez trop loin, monsieur Molière, et je vois où nous mène notre engouement pour les écrivains de ce siècle. Nous sommes aveugles, et le roi l’est peut-être plus que noua ; mais le sang de la Fronde n’est pas encore glacé dans nos veines, et nous ferons voir au besoin que le vieux monde n’est point près de finir !

Il sort.




Scène IV



MOLIÈRE

Ah ! le lion se réveille ! le roi ne lui aura point donné le commandement qu’il souhaitait… Moi, je livre avec Tartufe la bataille aux courtisans… et nos douleurs se sont rencontrées… Il reste absorbé.