Page:Sand - Theatre complet 3.djvu/259

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qui croit rêver aussi en se retrouvant près de volis ! Vous ne m’attendiez pas sitôt ; mais j’étais si pressé de vous revoir… Comment ! mon arrivée vous fait du mal ? vous pleurez ?

FAVILLA.

Pleurer, moi ?… Hélas ! non, j’ai eu trop de peines dans ces derniers temps, vois-tu ; je ne pleure plus maintenant ni de chagrin ni de plaisir !… Mais ce n’est pas tout ça : nous voici dans des circonstances graves, mon Anselme, et il faut avoir toute sa raison, toute sa volonté pour se montrer digne d’une position comme la nôtre.

ANSELME, à sa mère.

Mon Dieu ! est-ce qu’il va parler de… ?

MARIANNE, bas.

Ne le contredis pas !

FAVILLA.

Écoute, écoute, mon fils. Nous avons perdu notre ami, notre père, le meilleur des hommes ; tu sais qu’il a voulu nous consoler en nous faisant riches, il s’est trompé ! il a ajouté, à la douleur de sa perte, la charge de bien grands devoirs. Anselme, mon enfant, te voilà libre, te voilà seigneur ! eh bien, crois-moi, ne sois pas plus enivré que moi de tout cela ; travaillons, cultivons l’art, comme par le passé, sans nous refroidir. Gouvernons en vrais pères de famille les vassaux dont le sort nous est confié ; faisons comme celui qui nous donnait l’exemple de toutes les vertus ; soyons charitables comme lui, écoutons toutes les plaintes, et que ce qui nous a été donné pour profiter aux autres, profite aux autres plus qu’à nous-mêmes.

ANSELME, à Marianne.

Ah ! son âme n’a pas changé !

KELLER, observant Favilla, à son fils, à part.

Une folle tête et un bon cœur !

FAVILLA, montrant les Keller à Anselme.

Tiens, voilà ses neveux ! qu’ils soient nos amis ! Je te recommande ce jeune homme ; il a une physionomie sympa-