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MAUPRAT


DRAME EN CINQ ACTES, EN SIX TABLEAUX


Odéon, — 28 novembre 1853


La critique et le public demandent souvent, avec raison, s’il est favorable au développement de l’art littéraire de faire deux coupes de la même idée, et de reproduire sur le théâtre un sujet déjà traité dans un roman. Les réponses varient, et, comme toutes les questions de ce monde, celle-ci n’aura jamais pour solution que l’éternel c’est selon, applicable à toutes les choses humaines.

En principe, le théâtre étant la représentation des scènes de la vie, il est aussi naturel et aussi logique de prendre le sujet d’un drame dans un roman qu’il l’est de le prendre dans l’histoire ou dans le poëme épique. Personne n’a jamais reproché à la tragédie et au drame historique de répéter au public des événements déjà connus et appréciés par lui. Dira-t-on que personne ne s’est intéressé à Achille, à Ulysse, à Andromaque, à Hermione, parce que les tragiques anciens et modernes ont tiré ces solennelles figures de l’histoire, de la fable ou de la tradition ? Shakspeare n’a-t-il pas puisé, en outre, dans la chronique et la légende ? Soutenir que l’esprit du spectateur est nécessairement prévenu pour ou contre des types qu’il s’est appropriés par la lecture, ce serait donner un démenti à tout le passé comme à tout le présent, comme à toutes les grandes créations dramatiques, comme à toutes les fantaisies de l’art en général. La peinture n’aurait pas beau jeu à reproduire les traits des personnages illustres, la mu-