Page:Sand - Theatre complet 4.djvu/440

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CAROLINE, presque vaincue et fondant en larmes, tombe sur la chaise à gauche.

Ô mon Dieu !

URBAIN.

Caroline ! au nom de mon fils ! Pour lui, si ce n’est pour moi, et par pitié, si ce n’est par amour !

CAROLINE.

Ah ! laissez-moi, vous me tuez, c’est impossible !

URBAIN.

Caroline, je suis perdu, sans vous, oui, perdu ! Vous ne savez pas ce qu’il y a en moi d’aspirations dévorantes et de découragements amers ! Il y a de tout, des fautes misérables et de sincères expiations, des sacrifices et des exigences, du mal et du bien, des tempêtes ! J’ai aimé une seule fois avant de vous connaître et j’ai mal aimé ! La faute n’en est peut-être pas à moi seul, mais je ne veux pas l’atténuer. Voyez ! je ne sais pas mentir, je ne sais pas vous donner confiance en moi. J’ose à peine vous dire que votre bonheur, à vous, sera le but et l’ambition de ma vie, et pourtant, je sais qu’il y a encore dans ce cœur-là de quoi vous rendre fière et heureuse si vous l’estimez assez pour vouloir le guérir. Parlez-moi, ne me laissez pas désespérer, car, depuis hier, j’étouffe ! Je n’ai plus d’air pour respirer, je n’ai, plus de lumière pour me conduire. Je sens que je vous ai offensée, vous que j’adore, et il me semble que je ne mérite plus de vivre ! Ah ! si vous me haïssez, il eût cent fois mieux valu me laisser mourir cette nuit !

CAROLINE.

Moi, vous haïr !… Pourquoi dire des choses cruelles à une âme qui se brise ? Ah ! que votre affection est amère, et qu’il est difficile de ne pas l’exaspérer ! Voyons ! ayez souci de moi, pourtant. Ne suis-je rien, ne suis-je personne, pour que vous ne craigniez pas de me faire tout ce mal ?

LE DUC.

Vous l’aimez donc ?