Page:Sand - Theatre de Nohant.djvu/211

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que, s’il ne surmontait pas cette peine-là, il ne serait plus lui-même, et ne mériterait plus de nous tant d’estime et de respect. Va vite, et ne crains rien ! Je t’aime, mon bon Jean ! Je t’aime de tout mon cœur !

COQUERET.

Oh ! merci, merci, ma Louise, (Il sort.)


Scène XIX

LOUISE, seule. Elle va pour entrer chez Durand.

Tiens ! pourquoi donc a-t-il ôté sa clef ? Il ne l’ôte jamais. Il sait bien que personne n’entrerait chez lui sans frapper. Est-il malade, qu’il s’est enfermé comme ça ? (Elle frappe.) Monsieur, c’est moi, Louise ! Il ne répond pas, il ne bouge pas, il dort peut-être… Dormir dans le jour, ce n’est pas sa coutume. Il n’aime pas ça. Il faut donc qu’il soit bien fatigué ? Cela m’inquiète ! S’il a entendu ce que nous disions… Non ! on n’entend pas de sa chambre, à moins de se mettre tout près de la porte, et monsieur n’est pas homme à écouter comme ça ! Et, d’ailleurs, Jean n’a dit sur lui que de bonnes paroles,… des paroles que je veux lui dire à lui-même… Aurai-je ce courage-là ? Il souffrait tant tout à l’heure ! Ah ! il souffrait bien, puisqu’il était méchant ! Pauvre homme, mon Dieu ! je ne sais plus que faire !… Est-ce que… ? Mais oui ! il a repris son fusil ! Qu’est-ce qu’il avait besoin d’emporter son fusil dans sa chambre ? Bah ! je suis folle !… J’aurais bien entendu !… Pourtant j’ai été un peu loin pour chercher Jean. Du temps que je courais, il aurait pu… (Appelant.) Monsieur ! monsieur ! (Elle frappe.) Pas de réponse ? Ah ! ça me fait une peur que j’en deviens folle ! Monsieur !…