Page:Sand - Theatre de Nohant.djvu/93

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ARISTOPHANE.

Mais, si l’on a fait des changements dans ma pièce, on a donc mis quelque autre fiction à la place ?

MERCURE.

Une courte fiction amoureuse des plus simples.

ARISTOPHANE.

Je m’oppose à cela. L’amour n’est pas du ressort de la comédie !

MERCURE.

La comédie ne peut plus s’en passer.

ARISTOPHANE.

Allons ! rien ne doit étonner le sage ; mais quel audacieux s’est permis… ?

MERCURE.

Un grand poète tragique s’était permis, deux cents ans avant ce jour, de transporter, sous le titre des Plaideurs, quelques passages de tes Guêpes sur la scène. Pour conserver le comique de ta pièce, il dut l’adapter à des personnages de son temps, car les hommes n’ont jamais cessé de plaider. Ce qu’on va tenter ici, c’est de montrer les hommes et les dieux tels que tu les as dépeints toi-même, avec leurs noms, leurs idées, leur costume et leur manière de s’exprimer. Autant que possible, on a dégagé ta pensée de ce que le temps a rendu obscur, et on l’a exprimée ou complétée en compulsant tes autres pièces. Je dois t’avertir aussi qu’on s’est aidé de la pensée de Lucien, un beau génie, venu quatre siècles après toi, et qui, lui aussi, a traité le sujet de Plutus sans en altérer la philosophie.

ARISTOPHANE.

Alors, j’espère qu’on a conservé ma scène de la Pauvreté ?

MERCURE.

Oui, quelque longue qu’elle soit ; on a tenu à te montrer sous l’aspect sérieux, qui est le moins populaire de ton génie. Tout le monde sait que ton ironie était amère, que ni les grands, ni les petits, ni les savants, ni les poètes, ni les phi-