Page:Sand - Tour de Percemont.djvu/234

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Miette, il faut bien qu’Henri et moi nous y renoncions.

En ce moment, Henri vint nous annoncer que le dîner était prêt, et, lisant dans mes yeux, il embrassa sa mère et lui dit :

— Mère, j’ai un secret à te dire après dîner.

— Dis-le tout de suite, répondit-elle émue, le dîner attendra. Tant pis, je veux tout savoir !

— Eh bien ! il ne faut que deux mots, ma chère mère, j’aime Émilie, je l’ai toujours aimée ; mais je ne veux pas le lui dire sans ta permission.

Ma bonne chère femme ne répondit rien et courut à la cuisine. Elle trouva Miette dans l’office, lavant et essuyant ses jolies mains. Elle la prit par les épaules, puis par le cou, et l’embrassa maternellement à plusieurs reprises. Miette lui rendit ses caresses avec des yeux pleins de larmes et un adorable sourire sur les lèvres.

— Il n’y a pas besoin d’autre explication, leur dis-je, ceci est la meilleure.

En effet, Henri remerciait et embrassait aussi sa mère. On alla se mettre à table.

Le dîner fut si bon que, malgré la grande contrainte du premier moment, on ne put résister à cette entente, bestiale, si l’on veut, mais profondément cordiale, de gens qui communient ensemble après la fatigue d’une lutte et les bé-