Page:Sand - Tour de Percemont.djvu/31

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elle au bout de l’enclos. Il lui faut le temps de traverser sa vigne, mais elle a reconnu ma manière de sonner, elle va venir m’ouvrir elle-même comme autrefois !

» Elle n’est pas venue, c’est la vieille Nicole qui m’a ouvert et qui a pris la bride de mon cheval avec un empressement plein de trouble.

» — Entrez, entrez, monsieur Henri ! Oui, oui, mademoiselle va bien, elle est à la maison, monsieur Henri ; allez, allez, excusez-nous, c’est jour de lessive, tout notre monde est allé à la rivière pour ramener le linge ; on vous a fait attendre. C’est des jours comme ça où tout est sens dessus dessous, vous savez bien, monsieur Henri !

» J’ai franchi rapidement l’allée étroite et longue, du moins trop longue à mon gré ! Autrefois on reconnaissait ma voix de loin, et Jacques accourait. Jacques était absent. Le chien ne m’a pas reconnu et a jappé après moi. Émilie n’est venue à ma rencontre que jusqu’aux marches du perron. Elle m’a tendu la main la première ; mais dans sa surprise de me voir il y avait plus d’effroi que de joie. Elle était costumée comme autrefois, en demi-demoiselle, la robe de mousseline bien retroussée sur les hanches, le tablier de soie garni de dentelles, le petit chapeau de paille des paysannes, garni de velours noir et retroussé par derrière sur son