Page:Sand - Tour de Percemont.djvu/94

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monde. Chaque fois qu’une visite arrive, Miette s’est engagée à l’avertir afin qu’elle ne se montre pas. Elle a aussi pour consigne de ne pas dire que cette vieille nonne est chez elle, la règle de l’ordre commande à celle-ci de vivre et de mourir au couvent. L’évêque, vu la gravité du mal, a accordé une dispense de deux mois à la condition que la chose ne serait point ébruitée. C’est un secret que je te confie, et je te prie de n’en rien dire à ta mère. Miette, très-attachée à cette religieuse, se dévoue à la soigner, à la servir et à la tenir cachée. Comme toujours, avec un cœur d’ange, Miette se fait sœur de charité.

— Que doit-elle penser de moi qui l’accusais ? Est-ce que tu le lui as dit ?

— Pas si sot ! elle aurait quelque peine à te le pardonner ; mais pourquoi as-tu envie de pleurer ? Pleure si le cœur t’en dit ! seulement parle-moi franchement : Émilie t’est plus chère que tu ne veux l’avouer ?

— Mon père, dit Henri, j’ai envie de pleurer, j’ai envie de rire aussi.

— Ris et pleure, mais parle !

— Voilà le difficile. Parler, c’est se résumer, et je ne vois pas clair en moi-même. Je sais bien qu’Émilie est un ange, mieux encore, elle est une sainte, car, si elle a l’innocence et la candeur qu’on attribue aux êtres célestes, elle a le