Page:Sand - Valvèdre.djvu/141

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voir que la création, source de toute lumière et foyer de tout enthousiasme, ne puisse révéler qu’une de ses faces à son spectateur privilégié, à l’homme, qui, seul parmi les êtres vivant en ce monde, a reçu le don de voir en haut et en bas, c’est-à-dire de suppléer par le calcul et le raisonnement aux organes qui lui manquent ! Quoi ! nous avons brisé la voûte de saphir de l’empyrée, et nous y avons saisi la notion de l’infini avec la présence des mondes sans nombre ; nous avons percé la croûte du globe, nous y avons découvert les éléments mystérieux de toute vie à sa surface, et les poëtes viendront nous dire : « Vous êtes des pédants glacés, des faiseurs de chiffres ! vous ne voyez rien, vous ne jouissez de rien autour de vous ! » C’est comme si, en écoulant parler une langue étrangère que nous comprendrions et qu’ils ne comprendraient pas, ils avaient la prétention d’en sentir mieux que nous les beautés, sous prétexte que le sens des paroles nous empêche d’en saisir l’harmonie.

Mon nouvel ami parlait avec un charme extraordinaire ; sa voix et sa prononciation étaient si belles et son accent si doux, son regard avait tant de persuasion et son sourire tant de bonté, que je me laissai morigéner sans révolte. Je me trouvais assoupli et comme influencé par ce rare esprit doué de formes si charmantes. Était-ce là un simple médecin de campagne, ou bien plutôt quelque homme célèbre savourant les douceurs de la solitude et de l’incognito ?

Il marquait si peu de curiosité sur mon compte,