Page:Sand - Valvèdre.djvu/198

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madame de Valvèdre avait aussi quitté Genève. Je regrettais de ne l’avoir pas saluée. Adélaïde me répondit avec une sainte tranquillité que madame de Valvèdre était à la chapelle catholique au bas de la rue. Et, comme elle prenait mon trouble pour de la surprise, elle ajouta :

— Est-ce que cela vous étonne ? Elle est fervente papiste, et, nous autres hérétiques, nous respectons toute sincérité. C’est demain, nous a-t-elle dit, l’anniversaire de la mort de sa mère ; et elle se reproche de nous avoir fait, cette nuit, le sacrifice de danser. Elle veut s’en confesser, commander une messe, je crois… Enfin, si vous vouliez prendre congé d’elle, attendez-la.

— Non, répondis-je, vous voudrez bien lui exprimer mes regrets.

Les deux sœurs essayèrent de me retenir, pour causer, disaient-elles, une bonne surprise à Henri, qui allait rentrer. Adélaïde insista beaucoup ; mais, comme je ne cédai pas, et que, sans m’en vouloir, elle me dit amicalement adieu et gaiement bon voyage, je vis que cette simplicité de manières bienveillantes ne couvrait aucun regret déchirant.

Je fus à peine dehors, que je me dirigeai vers la petite église. J’y entrai ; elle était déserte. Je fis le tour de la nef ; dans un coin obscur et froid, je vis, entre un confessionnal et l’angle de la muraille, une femme habillée de noir, agenouillée sur le pavé, et comme écrasée sous le poids d’une douleur extatique. Elle était couverte de tant de voiles, que j’hésitai à la re-