Page:Sand - Valvèdre.djvu/79

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cérité évidente, et pourtant, quelque effort que fit Moserwald pour me cacher sa main gauche, je voyais bien qu’il n’avait plus sa bague. Un soupçon hideux pesait sur moi comme un cauchemar. Je pris le bras de l’israélite et je l’emmenai sur la galerie, comme pour lui parler d’autre chose. Je flattai sa vanité pour lui arracher la vérité.

— Vous êtes un habile homme et un amant magnifique, lui dis-je ; vous faites accepter vos dons de la manière la plus ingénieuse !

Il donna dans le piège sans se faire prier.

— Eh bien, oui, dit-il, voilà comme je suis ! Rien ne me coûte pour procurer un petit plaisir à une jolie femme, et je n’ai pas le mauvais goût de lui faire des conditions, moi ! C’est à elle de deviner.

— Et certainement on vous devine ? Vous êtes coutumier du fait ?

— Avec celle-ci… c’est la première fois, et je me demande avec un peu de crainte si elle prend réellement cette gemme de premier choix pour une améthyste de cent sous ! Non, ce n’est pas probable. Toutes les femmes se connaissent en gemmes, elles les aiment tant !

— Pourtant, si elle n’y connaît rien, elle ne vous devine pas, et vous voilà dans une impasse. Ou il faut vous déclarer, ou il faut risquer de voir la bague passer à la femme de chambre.

— Me déclarer ? répondit-il avec un véritable effroi. Oh ! non, c’est trop tôt ! je ne suis pas encouragé jusqu’à présent… à moins que ce ton moqueur ne soit