Page:Sand - Valvèdre.djvu/80

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une manière de grande dame !… C’est possible, je n’avais jamais visé si haut, moi !… car elle est comtesse, vous savez ? Son mari ne prend pas de titre, mais il est de grande maison…

— Mon cher, repris-je avec une ironie qu’il ne comprit pas, tout madré qu’il était, je ne vois qu’un moyen : c’est qu’un ami généreux l’éclaire sur la valeur de l’objet qu’on lui a fait si adroitement accepter. Voulez-vous que je m’en charge ?

— Oui ! mais pas aujourd’hui au moins ! Vous attendrez que je sois parti.

— Bah ! vous voilà bien craintif ! N’êtes-vous pas persuadé qu’une femme est toujours flattée d’un riche cadeau ?

— Non ! cela dépend ; elle peut aimer le cadeau et détester la personne qui l’offre. Dans ce cas-là, il faut beaucoup de patience et beaucoup de cadeaux, toujours glissés dans ses mains sans qu’elle songe à les repousser, et ne témoignant jamais d’aucune espérance. Vous voyez que j’ai ma tactique !

— Elle est magnifique, et très-flatteuse pour les femmes que vous honorez de vos poursuites !

— Mais… je la crois fort délicate, reprit-il avec conviction, et, si vous la critiquez, c’est qu’il vous serait impossible de la suivre !

Je ne lui passai pas ce mouvement d’impertinence et je rentrai au petit salon, bien décidé à l’en punir. Je me sentis dès lors un aplomb extraordinaire, et, m’approchant d’Alida :