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le saloir de mayence

rendrait, dans le courant de l’après-midi, le contenu de nos sacs, ou ce qu’il plairait à l’administration du camp de nous en rendre. Nous n’attendions pas sans impatience ce moment. À 3 heures, la cérémonie eut lieu en grande pompe, avec un déploiement considérable de preuves de la plus scrupuleuse honnêteté. Je dirai tout de suite que, tout compte fait, il ne manquait pas grand chose dans les sacs qu’on nous avait subtilisés. Mais ils avaient été fouillés comme nous le montra le désordre de certains portefeuilles, et d’ailleurs les Allemands n’avaient pas besoin de se cacher, et ils n’allaient pas se gêner pour nous confisquer franchement et devant nous ce qu’ils crurent bon de nous prendre.

Aucun officier n’assistait à l’opération. On sait que ces messieurs ont des scrupules et nul n’ignore qu’ils ne sont pas des bandits. Cette besogne vile était confiée à de simples soldats, à deux soldats exactement, installés de chaque côté d’une table dans le corridor froid où, avec notre tenue légère, nous étions transis. L’un d’eux vidait le sac sur la table, visitait les portefeuilles, supprimait les carnets, les papiers, les boussoles, les cartes, les jumelles, les appareils photographiques, les stylographes, les sifflets, les couteaux de poche et les canifs, car tout cela constituait, disaient-ils, du « butin de guerre ». Il remettait le reste au prisonnier qui protestait à chaque objet qu’on lui retirait ; puis, prélevant l’argent qu’il trouvait, il le donnait à son camarade, qui faisait office de changeur. Cours du jour : 78 marks pour 100 francs, le taux de principe d’avant la guerre ; mais les Allemands nous volaient, puisque, en gros, à cette époque, le mark