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à Adolphe Boschot


CHAPITRE XVI

le régime des représailles


L’Allemagne ne pouvait pas ne pas se rendre compte de l’état lamentable de prostration où la captivité réduisait les prisonniers qu’elle détenait. Néanmoins, il n’est pas surprenant qu’elle n’ait rien tenté pour adoucir leur sort. Son intérêt trouvait son compte à notre décrépitude. Mais son intérêt aussi, éveillé par le spectacle de nos misères, voulait qu’elle s’inquiétât du sort de ses propres prisonniers. S’il lui était indifférent que nous dussions rentrer chez nous comme des loques humaines, il ne lui convenait pas que ses enfants lui fissent retour dans les mêmes tristes conditions après la guerre. Pour éviter ce danger, elle n’hésita pas à employer un moyen infaillible : ce que nous appelons « chantage », elle le qualifia « représailles ».

La méthode est simple. Qu’un prisonnier écrive à ses parents qu’il n’est pas heureux en France, il n’en faut pas davantage. Les parents transmettent la plainte au Gouvernement Impérial et Royal. Berlin ordonne que tout un camp de prisonniers français subisse telles et telles mesures vexatoires, informe Paris de sa décision, et ajoute que l’ordre sera rapporté quand tel