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le purgatoire

Le prisonnier ne bouge pas. S’il ne savait pas que son impassibilité écrase l’Allemand, il poufferait.

— Vous n’avez plus rien, monsieur ?

— …

— Vous avez une carte et un kompass (boussole) ?

— …

— Vous avez aussi de l’argent allemand ?

— …

— Le colonel dit que, si vous les donnez, il ne vous punira pas. Mais, si vous ne les donnez point, vous recevrez des arrêts de rigueur, et toute la chambre comme vous.

— …

La cérémonie est terminée. Fut-elle plus sinistre que ridicule ? Quand Barzinque s’en va, fier comme un âne qui porte un sac d’éponges, ou quand le Lièvre effrayé s’éloigne en se cognant à tous les meubles, tant il est confus, tous les prisonniers de la chambre éclatent de rire, et quelqu’un conclut toujours :

— On les aura.

Les officiers de l’armée française ont à maintes reprises rendu hommage au dévouement de leurs ordonnances. Mais quel hommage ne devons-nous pas aux nôtres, nous, officiers prisonniers ? À Vöhrenbach, ils étaient une trentaine de soldats, et presque tous ne méritent que des éloges. Certes, quelques-uns ne faisaient pas toujours un joli métier, quand ils espionnaient pour le compte de la kommandantur. Hélas ! la faim est mauvaise conseillère, et nous les