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DE SANNAZAR. 7


V eu que deslors fuz mis soubz, un ioug tel

Q ue i’ay du mal plus qu’autre homme mortel.

D ire le puis, Amy, l’experience

M e faict quasi perdre la patience.


Ie vey premier luyre l’un de ses yeuz

P uis l’autre apres, en maintien gracieux.


Bien me souvient qu’elle estoit rebrassée

I usqu’aux genouz & que teste baissée

A u chault du iour un linge en l’eau lavoit,

C hantant si douz que tout ravy m’avoit :

M ais außitost comm’elle m’entreveit,

E lle se t’eut, que pas un mot ne deit,

D ont i’eu grand deuil : & pour plus me fascher,

E lle s’en va sa robe delascher

P our s’en couvrir : puis sans craindre avanture,

E n l’eau se mect iusques a la ceincture.

P arquoy de rage, a moins de dire ouy,

E n terre cheu tout plat esvanouy.


Lors par pitié me voulant secourir,

E lle s’escrie, & se prend a courir

T out droict a moy, si que ses cris trenchans

F eirent venir tous les pasteurs des champs,

Q ui des moyens plus de mille tenterent

P our me resourdre : & tant en inventerent,

Q ue mon esprit de sortir appresté,

F ut (pour adonc) en mon corps arresté,