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Page:Sarcey - La route du bonheur, 1909.djvu/211

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bonheur perdu.

sine ; mais tout ce qui ressemble à du bonheur perdu ou à un chagrin inutile m’irrite et me fait songer (encore que la comparaison soit vulgaire) à ces maladroits qui, marchant à l’aise sur une large chaussée, trouvent, cependant, le moyen d’empêtrer leurs jambes dans le parapluie qu’ils tiennent à la main, et de se casser le nez.

Le spectacle d’un être malheureux, alors que son destin le fit heureux, est agaçant comme la bêtise, révoltant comme l’injustice, exaspérant et un peu triste comme toutes les misères imaginaires qui font pleurer les enfants.

Mais arrivons à notre odyssée.

Il était, une fois, une jeune fille aussi bonne que belle ; la distinction de son cœur, la vivacité de son intelligence, la grâce de sa taille souple, l’harmonie de ses gestes, de sa voix caressante, de ses yeux rieurs et tendres, faisaient que tout le monde l’aimait. Instinctivement, on pensait d’elle : « Elle est charmante » : car, à ses attraits physiques, elle joignait ces mille dons aimables qu’on ne saurait analyser par le menu, mais qui se fondent en un seul : le charme, et s’expriment par le sourire.

— Quand Suzanne arrive quelque part, avait-on coutume de répéter, la température s’élève de dix degrés.