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ACTE QUATRIÈME.

bienheureuse… où l’on ne connaît que le pardon pour châtiment… et que le bienfait pour vengeance !…

UBERTA, luttant contre elle-même.

Mon pauvre enfant ?… si beau !… si jeune !… qu’il m’a tué ! — Je ne le vengerais pas !…

CORDELIA.

Non !… non !… car… il le répond :… « Il me fait horreur, ma mère, ce sanglant sacrifice que tu m’offres !… C’est le culte des réprouvés !… mais, moi… moi, je suis un ange !… Honore-moi… comme un ange… par la charité !… (Mouvement d’Uberta. — Cordelia, la voyant émue, poursuit en tombant à ses genoux.) Sauve ce malheureux. Fais cela pour moi, ô ma mère, ce pardon !… je l’attends, je l’appelle !… je, l’implore ! et cette clémence ira droit de ton cœur au mien, comme la plus tendre et la meilleure de tes caresses maternelles »

UBERTA, dont la colère est apaisée, tombant assise et fondant en larmes.

Ô mon Andreino !… mon trésor !… mon amour !… ma vie !… C’est donc vrai… jamais plus je ne te reverrai… jamais ! jamais…

CORDELIA, à genoux près d’elle.

Oui ! oui ! tu le reverras un jour ! mais si tu es du même ciel que lui, et si tu sais pardonner comme il pardonne !

UBERTA, après un silence, relevant sa figure toute baignée de larmes, et serrant Cordelia contre son cœur, en lui fermant la bouche.

Tais-toi !… voici ton frère !… (Elle reste assise, comme absorbée dans sa douleur.)


Scène IV.

Les Mêmes, GIUGURTA.
GIUGURTA.

Allons !… maintenant !… (Il reprend son manteau.)