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LES FEMMES FORTES.

GABRIELLE.

Mais c’est héroïque !…

LACHAPELLE, idem.

Ah !

GABRIELLE.

Mais vous êtes tout bonnement un grand homme !

LACHAPELLE, idem.

Oh !

GABRIELLE.

Mais je vous aime beaucoup, moi !

LACHAPELLE, vivement.

Alors vous consentez…

GABRIELLE.

À quoi ?

LACHAPELLE.

À m’épouser…

GABRIELLE.

Oh ! non !

LACHAPELLE.

Comment, non ?

GABRIELLE.

Vous autoriser à me faire une cour assidue pendant un nombre illimité d'années, oui. Mais me marier !…

LACHAPELLE.

Eh bien ?

GABRIELLE.

Moi ! J'enchaînerais ma liberté !… et je vous jurerais obéissance… Jamais !

LACHAPELLE.

Ah ! c'est moi qui mettrai mon bonheur à vous obéir !…

GABRIELLE.

Oui, oui… on dit ces choses-là ! puis après !… Lisez l'ouvrage de miss Deborah sur le mariage, c'est à faire dresser les cheveux sur la tête. Des maris qui ne veulent pas que leurs femmes sortent toutes seules… qui lisent leurs lettres, qui refusent de les mener au spectacle… qui les ramènent du bal à une heure du matin… qui se font tirer l'oreille pour un cachemire, qui les tutoient devant le monde, et pour diminuer d'autant leur importance par des comparaisons insultantes, les appellent mon petit chat, mon petit chien, mon petit chou…

LACHAPELLE.

Oh !… je ne vous appellerai jamais…