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LES FEMMES FORTES.

JONATHAN.

Il n’y a pas de neveu !… Je vous donne une heure pour me débarrasser de vous, de vos paquets et de vos jupons… Une heure, entendez-vous, ou je vous fais emballer par mes ouvriers ! (Il remonte vers la cheminée, et boit un verre d’eau. La nuit commence à venir.)

QUENTIN, aux femmes.

Ah ! voilà l’effet que vous produisez, vous !…

TOUTES.

C’est lui qui !…

QUENTIN.

Vous voulez apprivoiser un ours, et vous le rendez enragé !

MADAME TOUPART.

Mais, mon frère, toute la famille…

QUENTIN.

Ah ! parlons-en, de ma famille ! Et qu’est-ce que vous en avez fait de ma famille ? Une maison à l’aventure !… le gâchis, le désordre et le gaspillage partout !… (Montrant Jenny.) Une fille qui court la pretantaine à cheval !… (montrant Gabrielle) l’autre qui court le lièvre !… (montrant sa sœur) une vieille folle qui radote !… (montrant Deborah) une vieille fille qui baragouine !… (montrant madame Lahorie) et un Turco !… La voilà, ma famille !… Où peut-on être plus mal qu’au sein de ma famille ?…

DEBORAH.

Mais…

QUENTIN.

Ah ! vous, la médecine !… Allez voir… au Niagara, si j’y suis… (Aux autres.) Et vous, allez faire vos malles !…

GABRIELLE.

Nous-mêmes !…

QUENTIN.

Allez faire vos malles !…

JONATHAN, redescendant furieux.

Allez faire vos malles, by God !…

QUENTIN.

Mais on y va ! on y va !… Et dire que c’est moi qui l’ai fait venir de Californie !

(Jonathan les fait tous reculer et toutes les portes se referment sur lui en même temps.)