Page:Satyre menippee garnier freres 1882.djvu/315

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des Pairs, des Admiraux, et des Secretaires et Conseillers d’Estat, mais de Roy, point : il faut que celuy seul naisse de luy-mesme, pour avoir vie et valeur. Le borgne Boucher, pedant des plus meschants et scelerez, vous confessera que son œil, esmaillé d’or d’Espagne, ne veoit rien[1] ; aussy un Roy electif et artificiel ne nous sçauroit jamais veoir, et seroit non seulement aveugle en nos affaires, mais sourd, insensible et immobile en nos plaintes.

C’est pourquoy nous ne voulons ouir parler ni d’Infante d’Espagne, que nous laissons à son pere[2] ; ni d’Archiduc Arnest, que nous recommandons aux Turcs et au duc Maurice ; ni du Duc de Lorraine ou de son fils aisné, que nous lairrons manier au Duc de Bouillon et à ceux de Strasbourg[3] ; ni au Duc de Savoye[4], que nous abandonnons au sieur d’Edi-

  1. Boucher, curé de Saint-Benoît, était borgne. L’auteur de la Satyre laisse entendre que son bon œil ne voyait rien aux intérêts français à cause de l’or d’Espagne que Bouclier avait reçu ; et qu’un roi de France, choisi par les Espagnols, ne serait pas plus clairvoyant.
  2. Les médisants prétendaient que Philippe II aimait sa fille d’un amour qui n’avait rien de paternel.
  3. Charles, cardinal de Lorraine, fut élu en 1592 évêque de Strasbourg par les catholiques ; mais les protestants nommèrent un autre évêque. Le duc de Lorraine, père du cardinal, soutint les armes à la main les droits de son fils, et de là la guerre à laquelle la Satyre fait allusion.
  4. Charles-Emmanuel Ier, duc de Savoie, s’empara du mar-