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de la Trinité, encore qu’il eust quitté le Sainct Esprit[1].

J’en vy ung autre, de l’autre costé de l’escalier, qui estoit plus grand et large que les premiers, et meslé de plusieurs diverses et plaisantes droleries, qui me fit tourner pour le veoir parce qu’au dessus estoit escrit : description de l’isle de ruach, augmentée de nouveau depuis le temps de rabelais [2]. Au milieu estoit une dame coiffée en veufve de plusieurs maris, morts et vivants[3], qui avoit entre deux selles le cul à terre ; et autour d’elle y avoit force gens d’Eglise, moines, Jacobins et Jesuistes, les uns luy apportants des pacquets scellez et bridez, et aux autres elle en donnoit de mesmes ; les autres, qui estoient habillez comme curez de grosses paroisses, avoient des soufflets d’orgues, dont ils souffloient au cul de plusieurs manants, qui se laissoient emporter

  1. Villeroy avait été chargé, conjointement avec le chancelier de Chiverny, de dresser les statuts de l’ordre du Saint-Esprit. Henri III l’en fit Grand Trésorier, le 30 décembre 1578. Il paraît que du temps où il était ligueur, il avait quitté les insignes de l’ordre.
  2. Rabelais a inventé l’île de Ruach, dont le nom en hébreu signifie vent ou esprit. L’île de Ruach désigne ici Paris, livré aux fureurs des partis.
  3. La Ligue, veuve de ses maris, c’est-à-dire ses partisans, dont les uns étaient morts et les autres l’abandonnaient pour le parti du roi.