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Page:Satyre menippee garnier freres 1882.djvu/372

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l’avois peu achever qu’au temps qu’il fallut plier bagage pour s’en venir en ceste ville, aprés que les Parisiens furent retournez à leur bon sens, et reduicts en l’obeissance du Roy. — Cela vous a bien succedé[1] dit-il ; car, auparavant que l’eussiez mis en vente, on en avoit desja veu plusieurs copies imparfaictes et barbouillées, qui avoient donné plus d’envie de veoir le reste bien limé et mis au net. Mais vous vous estes trompé, en vostre Epistre liminaire, d’avoir dict que ce fust un Italien qui le fist aux Estats de Paris ; car je sçay fort bien le nom de celuy qui l’a faict, et qui ne se tient pas loin d’icy.

Alors je fus tout rejouy de ceste rencontre, et le priay instamment de me le nommer, au moins s’il m’estoit permis de le sçavoir, parce que j’avois beaucoup de choses d’importance à luy dire pour son bien et honneur. — Je vous diray, dit-il, son nom, et vous enseigneray son logis, à la charge de ne les reveler à personne ; car il est homme qui n’ayme pas estre tant visité. Ceux qui vous ont rapporté qu’il estoit d’Italie se sont abusez d’une lettre seulement : il n’est pas d’Italie, mais d’Alethie[2] (qui est bien loing de l’autre), et est natif d’une petite ville qu’on appelle Eleuthere[3], habitée et bastie par les Parisiens, qui ont guerre continuelle contre les Argyrophiles et Timomanes[4] nation fort puissante et populeuse. Son nom est le seigneur Agnoste[5], de la famille des Misoquenes[6],

  1. Réussi.
  2. Pays de la vérité.
  3. Libre.
  4. Qui aiment l’or et les honneurs.
  5. Inconnu.
  6. Qui méprisent les nouveautés.